Laurent Marbacher

Silhouette of helping hand between two climber

Pas de libération sans transformation du leader

Dans les récits de libération d’entreprise ou les exposés sur ses pré-requis, l’accent mis sur la transformation de la personne du leader est une constante. Celle-ci est souvent présentée comme le fruit d’un travail intérieur : prise de conscience radicale suite à une rupture, cheminement spirituel, coaching, thérapie ou analyse… Chaque cas est particulier, mais il est clair que pour réussir une démarche de libération, le leader doit questionner ce qui a pu faire son succès pendant des années, s’affranchir d’une certaine image de son rôle, renoncer à l’illusion de tout savoir, de tout contrôler ou de tout mesurer.

Pourtant, sans vouloir minimiser l’apport de conseillers ou d’accompagnateurs personnels (ils sont indispensables dans la grande majorité des cas), il me semble qu’il existe pour le dirigeant qui souhaite évoluer une source très efficace, et pourtant souvent négligée, pour progresser rapidement : ses collègues !

Un bel exemple

Je me suis fait cette réflexion, il y a quelques semaines, lors d’une rencontre organisée avec tous les cadres d’une entreprise. J’ai été témoin d’une interaction très rare et très précieuse entre un leader et son équipe. Les cadres terminaient un temps d’échange autour de questions importantes pour eux : le rythme et le niveau d’appropriation de la démarche, le vocabulaire à employer ou à éviter dans leur contexte, les interrogations ou les doutes des uns et des autres,… Pour conclure cette séquence, ce Directeur prend la parole, remercie les participants pour la qualité de leurs interventions et dit : « Je n’ai pas le temps ici pour répondre à toutes les questions qui ont été posées… » Une femme l’interrompt alors : « Mais, M. le Directeur, ici, personne ne vous a demandé de répondre aux questions que l’on s’est posées… » Et le leader de remercier avec humilité pour cette intervention, qui lui permet de prendre conscience d’automatismes dont il a à se libérer, s’il veut véritablement développer l’autonomie et la responsabilité de ses collègues.

Laissez vos collègues vous aider, les fruits seront nombreux

Évidemment, un tel moment ne peut pas survenir sans qu’il existe un climat de confiance et d’apprentissage bien établis. C’était le cas dans cette entreprise. Mais lorsque le leader se met en première ligne pour demander de l’aide dans sa transformation personnelle, son attitude donne le ton pour tous. Comment pourrait-il exiger que chacun – et particulièrement les managers intermédiaires – change de posture, si lui-même ne donne pas l’exemple ? Comment pourrait-il montrer qu’il comprend la lenteur de telles évolutions, s’il ne reconnaît pas publiquement qu’il doit faire preuve de patience aussi avec lui-même ? Comment pourrait-il enfin utiliser le levier formidable qu’est une équipe, s’il ne montre pas dans ses actes, qu’il compte – lui aussi – sur les autres pour l’aider à progresser ?